Chambre des représentants
Télétravail des Frontaliers
05/05/2022
Benoît est intervenu sur la proposition de résolution relative aux travailleurs frontaliers en télétravail (2365/1-4) en séance plénière ce jeudi 5 mai.
Intervention :
Benoît Piedboeuf (MR): Madame la présidente, je suis désolé, mais avec ce que je viens d'entendre, on peut pervertir tous lesdossiers. Pour ma part, je vais plutôt vous parler
des frontaliers belges, qui sont bien formés en Wallonie et qui vont notamment travailler au Grand-Duché, parce qu'ils apportent la science et la formation qui sont excellentes en Wallonie.
Ce dossier chemine depuis longtemps car il porte une vieille revendication. Je remercie donc mon collègue Mathéï d'avoir pris l'initiative de cette proposition de résolution, que j'ai cosignée. Évidemment, un chiffre est un chiffre. Un certain dynamisme peut s'en retrouver entravé. Nous nous rendons compte que, pour toute une série de dirigeants d'entreprise belges qui travaillent à l'étranger, le dépassement du nombre de 24 jours découle de leurs déplacements dans le monde entier en raison de leur fonction. Ensuite, le fisc
belge les rattrape au motif qu'ils auraient dépassé le nombre de jours et il les taxe. C'est évidemment très désagréable et c'est anti-économique. De plus, les gouvernements des pays voisins en ont marre de répondre à des demandes de renseignement du fisc belge et d'avoir des soucis avec les travailleurs qui sont rattrapés par celui-ci.
C'est une vieille revendication à propos de laquelle un accord de principe avait été conclu sous la législature précédente entre les ministres Gramegna et Van Overtveldt, entre les premiers ministres Charles Michel et Xavier Bettel, autour d'un chiffre de 48 jours. Les administrations fiscales avaient été chargées de préparer des modifications de la convention préventive de double imposition - cela concernait le volet luxembourgeois. Finalement, le dossier n'a pas avancé, en raison d'une résistance de l'administration, qui estime que cela revient à une perte de souveraineté, celle-ci empêchant de rentrer des recettes fiscales. Or ce n'est pas exactement le cas, bien entendu. En effet, qu'un travailleur frontalier travaille quelques jours supplémentaires dans l'État ne change en rien sa situation. Par conséquent, il n'y a pas plus ou moins d'impôts; on lui offre simplement un peu plus de souplesse.
Alors, pourquoi 48 jours? D'abord, parce qu'une résolution du Parlement Benelux - votée à l'unanimité - réclame ce nombre de jours. Ensuite, nous essayons de viser un jour par semaine. Cela permet un peu plus de confort dans la gestion de sa vie privée, dans les déplacements, avec des conséquences sur la production de CO2 dans les embouteillages. C'est pourquoi le ministre écologiste luxembourgeois est tellement attiré par cette extension qui réduirait la circulation dans la capitale grand-ducale.
Mais le problème est le même, les collègues l'ont évoqué, avec la France, l'Allemagne et les PaysBas, d'où la résolution qui avait été prise. Tout le monde est d'accord sur cette extension. Maintenant, il y a le problème fiscal et le problème sécurité sociale. On sait qu'il existe une limitation européenne par rapport aux 25 % de prestations hors de l'État. Il faut donc harmoniser cela.
La recommandation qui a été initiée par mon collègue Matheï demande à ce qu'on travaille sur ces deux volets-là et qu'on réalise une évaluation.
On dit en effet qu'en concluant ce type d'accord, on atteint à la souveraineté fiscale de la Belgique, il faut faire la démonstration que ce n'est pas le cas. C'est un facteur de dynamisme. C'est un facteur de développement économique. Il est donc important que nous y travaillions. On va relayer le message au ministre des Finances, même s'il l'a déjà entendu. Il était parvenu, notamment avec le Grand-Duché de Luxembourg, à passer de 24 à 34 jours. On demande un effort supplémentaire et on demande d'harmoniser le système au niveau international. Il faut que les travailleurs belges puissent circuler dans l'OCDE avec cette faculté aussi de télétravailler.
C'est une proposition de résolution mais nous allons suivre l'intérêt du ministre pour la résolution et on va essayer de peser de tout notre poids pour avancer vers la concrétisation de cette proposition. J'ai vu qu'il existait une proposition de loi pour augmenter le nombre de jours. C'est un travail qui se mène étape par étape: on a fait 24, puis 34. Quand on sera à 48, peut-être demandera-t-on un peu plus mais, pour l'instant, nous visons un jour par semaine. C'est la raison pour laquelle le groupe MR va soutenir avec enthousiasme cette proposition de résolution.
Réplique :
Benoît Piedboeuf (MR): Madame la présidente, je ne veux pas allonger lé débat mais je dois dire une chose importante. Comme M. Arens l'a signalé, dans la proposition Benelux qui est aussi une proposition de résolution, il est bien fait référence aux accords de principe, mais comme tous les accords de principe, ils doivent être mis en œuvre par des légistes et les légistes n'ont pas fait leur boulot. C'est vrai! Mais ce n'est ni le premier ministre luxembourgeois ni le premier ministre belge qui n'ont pas fait leur boulot, ce sont les légistes. Indépendamment de cet aspect - parce que là, on est en train de jouer à faire de la politique -, M. Mathéï a fait une remarque importante concernant les travailleurs indépendants. Il est vrai que dans la résolution Benelux, nous les avions visés. Ce n'est pas encore le cas ici, notammentparce que les travailleurs indépendants ont en général un établissement stable et à partir de ce moment, ils se posent moins ce type de questions. Par contre, que se passe-t-il actuellement? En période covid, comme il y a eu interdiction de se rendre dans l'État voisin puisque le Grand-Duché de Luxembourg avait fermé ses frontières, certains indépendants, notamment des avocats qui prestent au Luxembourg, n'ont pas passé la frontière puisque ce n'était pas possible mais ont travaillé à domicile et maintenant ils ramassent un redressement fiscal de la part du fisc belge!
C'est quand même extraordinaire! Des avocats, qui sont des indépendants et qui doivent prester au Grand-Duché, n'ont pas pu s'y rendre parce que la frontière était fermée à cause du covid… et le fisc belge vient les taxer! Vous dites que c'est le politique qui détient le pouvoir, tandis que l'administration doit obéir. Or preuve est apportéeque ce n'est pas le cas! Et je le regrette autant que vous, cher M. Arens. L'administration fiscale devait élaborer une modalité de modification de la convention préventive de double imposition. Elle ne l'a pas fait. Nous voyons à présent que le fisc belge est en train de rattraper des indépendants qui n'ont pas pu passer la frontière. Dans quel pays vivons-nous?
Nous y travaillons. Comme l'a dit Steven Mathéï, nous avons élargi le champ, puisque nous visons tous les pays voisins. Il s'agit donc d'une avancée majeure qui suit, au demeurant, la résolution du Parlement Benelux.
J'en ai fini, madame la présidente.